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Femmes au Sénégal: Briser les chaînes du silence et des
inégalités
DAKAR/GENEVE (17
avril 2015) – Il est temps de briser les obstacles socio-culturels qui
empêchent les femmes sénégalaises de pleinement réaliser leurs droits, a
déclaré la Présidente du Groupe de Travail de l’ONU sur la question de la
discrimination contre les femmes dans la législation et dans la pratique, Emna
Aouij, au terme d’une visite de dix jours dans le pays.
L’experte de l’ONU a souligné que des progrès notoires ont
été réalisés au Sénégal, qu’il s’agisse du cadre légal et institutionnel ou des
nombreuses politiques et activités visant à promouvoir et protéger les droits des
femmes. Toutefois de fortes contraintes d’ordre socio-culturel et juridique
continuent à faire obstacle à la réalisation de l’égalité des genres.
« Il est inadmissible que sous le prétexte de la tradition,
des coutumes ou encore de la pauvreté, des filles et des femmes voient leurs
droits fondamentaux bafoués, soient violentées, abusées et vivent dans des
conditions indignes », a-t-elle poursuivi.
Mme Aouij a ainsi insisté sur la nécessité de modifier
certaines dispositions légales, en particulier celles stipulant la puissance
maritale et paternelle dans le Code de la famille sénégalais.
« Je suis particulièrement alarmée par l’échelle des
violences faites aux femmes, perpétuées par des attitudes et valeurs
patriarcales conservatrices», a déclaré Mme Aouij. « Tous les interlocuteurs
que j’ai rencontrés lors de ma visite ont souligné le nombre effarant de viols,
d’incestes, de harcèlement sexuel et de violence domestique. Il s’agit là d’un
problème grave et généralisé qui requiert des mesures urgentes à tous les
niveaux.»
L’experte a par ailleurs souligné que, malgré l’absence de
barrière formelle pour la pleine
participation des femmes à la vie économique du pays, dans la pratique, de
nombreux obstacles se posent. Plus de 80% des femmes actives travaillent dans
le secteur informel, ne bénéficiant donc pas des services sociaux de base et
travaillant souvent de longues heures dans des conditions insalubres et parfois
dangereuses. Mme Aouij s’est aussi inquiétée de l’accès à la terre très limité
des femmes et ce bien qu’elles assurent l’immense majorité de la production
agricole.
L’experte s’est félicitée que le Sénégal ait atteint la
parité de genre dans l’accès à l’éducation primaire et un taux brut de
scolarisation des filles de 98%. Elle a toutefois souligné que les abandons
scolaires restaient beaucoup plus élevés chez les filles. « Les travaux
domestiques, les abus sexuels en milieu scolaire, les mariages et les grossesses précoces sont
autant de facteurs d’échec scolaire », a expliqué l’experte.
Mme Aouij a par ailleurs souligné les progrès considérables
réalisés par Sénégal en termes de participation des femmes à la vie politique,
notamment grâce à la loi sur la Parité de 2010. Le pays se trouve ainsi au 7ème
rang mondial quant au nombre de femmes parlementaires. Les élections locales de
2014 ont toutefois montré que la marginalisation politique des femmes n’est
toujours pas complètement résolue. Le pays ne compte ainsi que 13 femmes maires
sur un total de 557 communes.
« Il reste beaucoup à accomplir pour que les femmes
sénégalaises puissent pleinement bénéficier de leur droit à la santé », a par
ailleurs souligné l’experte. Parmi les nombreux problèmes rencontrés figurent:
(i) les mauvaises conditions d’hygiène, les contraintes d’accès à l’eau et
surtout à l’eau potable; (ii) le manque d’information et de maîtrise de leurs
droits et santé sexuels et reproductifs entraînant des grossesses à un âge
précoce; (iii) un taux de prévalence du VIH/Sida beaucoup plus élevé chez les
femmes; (v) des pratiques et coutumes préjudiciables telles que les mutilations
génitales (un quart des femmes de 15 à 49 ans ont déclaré en avoir été
victimes).
Le Sénégal a par ailleurs l’une des lois sur l’avortement
les plus restrictives d’Afrique et qui pénalise surtout les femmes en situation
de précarité socio-économique. Le Groupe de Travail soutient fortement le
projet de loi en cours visant à élargir l’avortement médicalisé aux cas de
viols et d’inceste.
« Pour briser les chaînes du silence et de l’inégalité, les
femmes sénégalaises doivent obtenir une plus grande autonomie, être dûment
formées et informées, mener des activités économiques leur assurant un
développement économique durable et pouvoir accéder à la justice, sans
discrimination aucune », a conclu Mme Aouij.
Au cours de cette visite officielle qui s’est déroulée du 7
au 17 avril, la Présidente du Groupe de Travail s’est rendue à Dakar, Yeumbeul,
Pikine, Kaolack, Diourbel, Fandène et Thiès.
Les conclusions et recommandations de cette visite seront
développées dans un rapport qui sera présenté au Conseil des droits de l’homme
en juin 2016.
FIN
Le Groupe de travail des Nations Unies sur la question de la
discrimination contre les femmes en droit et dans la pratique a été créé par le
Conseil de droits de l’homme en 2011 pour identifier, de promouvoir et
d’échanger des vues, en consultation avec les États et les autres acteurs, sur
les bonnes pratiques liées à l’élimination des lois que la discrimination
contre les femmes. Le Groupe est également chargé de développer un dialogue
avec les États et les autres acteurs sur les lois qui ont un effet
discriminatoire en ce qui concerne les femmes.
Le Groupe de Travail est composé de cinq expertes
indépendantes. La Présidente-Rapporteur est Emna Aouij (Tunisie), la
Vice-Présidente Rapporteur est Eleonora Zielinska (Pologne) et les autres
membres sont Mme Kamala Chandrakirana (Indonésie), Mme Alda Facio (Costa Rica)
et Mme Frances Raday (Israël/Royaume-Uni). Pour plus d’information,
connectez-vous sur :
http://www.ohchr.org/EN/Issues/Women/WGWomen/Pages/WGWomenIndex.aspx
Les experts indépendants font partie de ce qui est désigné
sous le nom des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les
procédures spéciales, l’organe le plus important d’experts indépendants du
Système des droits de l’homme de l’ONU, est le terme général appliqué aux
mécanismes d’enquête et de suivi indépendants du Conseil qui s’adressent aux
situations spécifiques des pays ou aux questions thématiques partout dans le
monde. Les experts des procédures spéciales travaillent à titre bénévole; ils
ne font pas partie du personnel de l’ONU et ils ne reçoivent pas de salaire
pour leur travail. Ils sont indépendants des gouvernements et des organisations
et ils exercent leurs fonctions à titre indépendant.
Pour toute question complémentaire et demandes de presse , veuillez contacter:
À Genève : Bernadette
Arditi (+41 22 917 9159 / mobile : +41 79 444 4078 / barditi@ohchr.org )
ONU Droits de l’homme, suivez-nous sur les réseaux sociaux
:
NEWS RELEASE
Women in Senegal: Breaking the chains of silence and
inequality
DAKAR/GENEVA (17 April 2015) – It is time to break
socio-cultural barriers that prevent Senegalese women to fully realise their
rights, said the Chairperson of the UN Working Group on the issue of
discrimination against women in law and in practice, Emna Aouij, at the end of
a ten-day visit to the country.
The UN expert stressed that significant progress has been
achieved in Senegal, whether in terms of the legal and institutional framework
or the many policies and activities aiming to promote and protect women’s
rights. However, strong socio-cultural and legal constraints continue to stand
in the way of the achievement of gender equality.
“It is unacceptable that under the guise of tradition,
customs or poverty, girls and women have their basic rights violated, are
assaulted, abused and live in unworthy conditions”, she continued.
Ms. Aouij insisted on the need to amend certain legal
provisions, particularly those stipulating the marital and paternal authority
in the Senegalese family code.
“I am particularly alarmed at the level of violence against
women, perpetuated by patriarchal attitudes and conservative values”, Ms. Aouij
said. “All the stakeholders that I met during my visit stressed the alarming
number of rapes, incest, sexual harassment and domestic violence. This is a
serious and widespread problem that requires urgent action at all levels”.
The expert also pointed out that, despite the absence of
formal barriers to the full participation of women in the economic life of the
country, in practice, there are many obstacles. Over 80% of active women work
in the informal sector, not benefiting from basic social services and often
working long hours in substandard and even dangerous conditions. Ms. Aouij was
also concerned of the very limited access to land for women and this even
though they provide the vast majority of agricultural production.
The expert was pleased to know that Senegal has achieved
gender equality in access to primary education and a gross enrolment rate for
girls of 98%. However, she highlighted that dropouts remained much higher among
girls. “Domestic work, sexual abuse in schools, early marriages and early
pregnancies are factors of school failure”, said the expert.
Ms. Aouij also stressed the considerable progress made by
Senegal in terms of women's participation in political life, particularly
through the 2010 Law on Parity. The country is now ranking 7 th in the world in
terms of number of parliamentarian women. However, the 2014 local elections
showed that the political marginalisation of women is still not fully resolved.
The country only has 13 women mayor out of a total of 557 municipalities.
“Much remains to be done so that Senegalese women can fully
enjoy their right to health”, also stressed the expert. Among the many problems
encountered are: (i) poor hygienic conditions, constraints to access to water
and especially drinking water; (ii) lack of information and lack of control
over their sexual and reproductive rights and health resulting in pregnancies
at an early age; (iii) a prevalence rate of HIV/AIDS much higher among women;
(iv) harmful practices and traditions such as female genital mutilations (a
quarter of women aged between 15 and 49 reported having been victim of these
practices).
Senegal has also one of the most restrictive abortion laws
in Africa and which penalizes particularly women in precarious socio-economic
situations. The Working Group strongly supports the current bill aiming to
expand therapeutic abortion in cases of rape and incest.
“To break the chains of silence and inequality, Senegalese
women need to have more autonomy, to be properly trained and informed, to
conduct economic activities ensuring their sustainable economic development and
to access justice without discrimination”, concluded Ms. Aouij.
During this official visit, which took place from 7 to 17
April, the Chairperson of the Working Group visited Dakar, Yeumbeul, Pikine,
Kaolack, Diourbel, Fandène and Thiès.
The conclusions and recommendations of this visit will be
developed in a report that will be presented to the Human Rights Council in
June 2016.
ENDS
The UN Working Group on the issue of discrimination against
women in law and in practice was created by the Human Rights Council in 2011 to
identify, promote and exchange views, in consultation with States and other
actors, on good practices related to the elimination of laws that discriminate
against women. The Group is also tasked with developing a dialogue with States
and other actors on laws that have a discriminatory impact where women are
concerned.
The Working Group is composed of five independent experts:
the Current Chair-Rapporteur is Ms. Emna
Aouij (Tunisia), Vice-President:
Ms. Eleonora Zielinska (Poland), Ms.
Kamala Chandrakirana (Indonesia),
Ms. Alda Facio (Costa Rica) and Ms. Frances Raday
(Israel/United Kingdom). Learn more, log on to: http://www.ohchr.org/EN/Issues/Women/WGWomen/Pages/WGWomenIndex.aspx
The independent experts are part of what is known as the
Special Procedures of the Human Rights Council. Special Procedures, the largest
body of independent experts in the UN Human Rights system, is the general name
of the Council’s independent fact-finding and monitoring mechanisms that
address either specific country situations or thematic issues in all parts of
the world. Special Procedures’ experts work on a voluntary basis; they are not UN
staff and do not receive a salary for their work. They are independent from any
government or organization and serve in their individual capacity.
For inquiries and
media requests , please contact:
In Geneva : Bernadette Arditi (+41 22 917 9159 / mobile: +41
79 444 4078 / barditi@ohchr.org )
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